Ana Maria Olaya Vargas

Reading Time: 11 minutes

Ana Maria Olaya Vargas
MSc IM 2015
Paris

Vice-présidente Strategy Pricing & Interchange Europe – Mastercard

Vice-présidente Strategy Pricing & Interchange Europe chez Mastercard, Ana Maria Olaya Vargas incarne un féminisme moderne et réfléchi, inspiré du brassage des cultures qui l’ont menée de Bogota à Paris, en passant par le Master en Management International d’Audencia.

Sa trajectoire professionnelle, de la banque d’affaires à l’analyse financière, est un modèle d’audace, de détermination et de résilience.

À seulement 33 ans, Ana Maria mène sa carrière avec talent et un opportunisme parfaitement maîtrisé, tout en faisant face, sans crainte ni tabou, aux questions de sa génération sur l’environnement, la maternité ou l’inclusion.

Keynote speaker à ses heures perdues, Ana Maria est aussi une contributrice centrale du livret « Go France ! » d’Audencia, dans lequel elle partage son parcours et ses conseils pour les étudiants internationaux désireux de travailler en France. Son conseil : apprenez le français le plus vite possible !

À quel moment la jeune fille colombienne que vous étiez s’est-elle glissée dans le tailleur d’une cadre dirigeante parisienne ?

Quand j’ai concrétisé mon rêve d’enfant de poursuivre mes études à l’étranger. Donc arriver en France, à Audencia, correspondait à une sortie de ma zone de confort.

Au départ, je visais l’Australie mais c’était trop loin, cher et difficile d’accès. Quand j’ai découvert le Master en Management International d’Audencia, j’ai réalisé l’opportunité unique qu’il représentait : un enseignement en anglais, dans un pays magnifique, la France.

Je n’ai pas hésité : je me suis lancée dans le processus de recrutement tout en poursuivant ma mission de Senior Financial and M&A Analyst chez Incorbank. C’est en effet une des particularités du système colombien : la plupart des étudiants commencent à travailler après la première partie de leur parcours universitaire et ne poursuivent un Master que trois ou quatre ans plus tard. C’est ce que j’ai fait aussi.

Audencia fut donc déterminant dans mon parcours, pour la qualité des apprentissages, bien sûr. Mais aussi et surtout pour tout ce que j’ai appris sur moi-même pendant cette période : l’agilité, la résilience et la capacité d’adaptation. Il faut dire que je ne m’attendais pas du tout à la complexité des démarches administratives pour étudier à l’étranger, avec au passage une belle frayeur quand ma confirmation d’inscription s’est perdue dans mes spams ! La recherche de logement s’est aussi transformée en parcours du combattant, tout comme l’intégration dans un système éducatif très différent du mien.

Aujourd’hui, tout ça me semble loin. Mais je suis certaine que si je suis capable d’évoluer avec aisance dans un milieu international exigeant comme celui de Mastercard, c’est en partie grâce à cette expérience : je ne me suis jamais contentée de la facilité. Et je n’ai jamais laissé la peur dicter mes choix.

Votre jeunesse en Colombie semble aussi avoir beaucoup influencé votre vision professionnelle d’aujourd’hui.

Oui, bien sûr ! J’ai grandi à Bogota, dans une famille unie avec une sœur de seize mois mon aînée, si proche qu’on nous prenait souvent pour des jumelles. J’ai reçu une éducation rigoureuse, dans une école catholique pour filles, avec un regard bien précis sur la place et le rôle des femmes dans la société. Une vision qui a bien sûr évolué au gré de mes expériences de vie, des étapes de ma carrière et de mes rencontres, avec mon ex-mari d’origine Indienne par exemple. Mais cette première partie de ma vie est toujours très présente dans les choix que je fais aujourd’hui, même si c’est pour la bousculer un peu parfois.

Au-delà de cet aspect religieux et culturel, mon éducation m’a apporté rigueur et discipline personnelle. Petite, j’étais très studieuse : ça ne me coûtait pas parce que j’ai toujours aimé apprendre. J’ai appris l’anglais en grande partie dans ma chambre, d’ailleurs, en écoutant de la musique américaine. Aujourd’hui, je garde de cette période une solide éthique de travail et une capacité presque innée à maintenir des relations interpersonnelles fortes, ce qui m’aide à naviguer dans des environnements professionnels diversifiés, à respecter et à comprendre les différences culturelles, tout en restant fidèle à mes propres valeurs.

Venir étudier en France fût une décision audacieuse, la plus audacieuse de votre carrière ?

Audacieuse ou téméraire ? Quoi qu’il en soit, je pense que la décision la plus compliquée fût celle de rester en France à la fin de mon Master, puis de nouveau à l’issue de mon stage chez Euro Latina Finance.

Au départ, je n’étais venue que pour un an et j’avais un billet retour pour le mois de juillet, à la fin des cours. J’ai mis huit mois à me sentir bien en France et quand j’ai rencontré mon futur mari, lui aussi étudiant à Audencia, je n’avais pas l’idée de rester et de m’installer à Paris. Alors, après quelques semaines de relation, nous avons rompu et je suis rentrée comme prévu en Colombie. Mais nous étions malheureux, l’un comme l’autre.

J’ai donc décidé de laisser faire le destin en cherchant un poste en Colombie ou un stage à Paris. En août, j’ai rencontré le patron d’Euro Latina Finance, qui cherchait à investir dans mon pays. Et tout s’est enchaîné : deux semaines plus tard, je démarrais un stage d’analyste M&A pour le marché colombien, basé à Paris.

À la fin de ce stage, j’ai cependant refusé leur proposition de prendre la responsabilité du nouveau bureau de Medellin pour pouvoir rester à Paris. Même si cela signifiait de s’exposer à de nouvelles recherches d’emploi et donc, des difficultés financières. Nous avons passé de longues soirées à manger frugalement devant Game of Thrones. Mais je ne regrette rien, parce que c’est finalement ce qui m’a conduit chez Mastercard.

Comment s’est passé votre recrutement chez Mastercard ?

De manière assez inattendue, je dois dire ! Je n’avais pas le profil recherché sur les postes d’analyste financier pour lesquels je candidatais, car mon expérience était exclusivement en banque d’investissement. Je suis comme de nombreuses femmes : si je ne coche pas toutes les cases d’une offre d’emploi, j’ai un peu tendance à ne pas y aller. Mais cette fois, je me suis lancée parce que le poste m’intéressait – et parce que j’étais un peu aux abois financièrement. J’ai capitalisé sur mes compétences et cela a capté l’attention des recruteurs.

Je suis donc entrée chez Mastercard, à Paris, en juin 2016, sur un poste de Senior Financial Analyst, responsable de l’analyse des données financières pour soutenir les décisions stratégiques sur le marché français. J’ai beaucoup appris pendant ces deux années, en compensant mon manque d’expérience par une attitude très proactive. Je cherchais toujours à faire le truc en plus, prendre une mission supplémentaire, aller plus loin dans un dossier. Cette attitude est la clé du développement professionnel et donc de la progression en entreprise.

C’est comme ça que j’avais été recrutée, mais aussi que j’ai décroché mon deuxième poste chez Mastercard.

Deux ans tout juste après votre recrutement, vous devenez Finance Manager Europe chez Mastercard. C’est une évolution rapide ?

Oui, particulièrement pour une jeune femme arrivée sans expérience préalable dans l’analyse financière. Mais je reviens à ce que j’ai appris étant plus jeune : travailler fort, croire en soi, saisir les opportunités. Et dépasser le stade du doute.

Mon évolution est le résultat de cette combinaison de facteurs et d’une attitude proactive qui m’a permis de me faire repérer. Lorsque la Finance Manager pour l’Europe de l’Ouest a dû s’absenter pour plusieurs semaines pour des raisons personnelles, je me suis proposée pour assumer temporairement ses responsabilités, ce qui a été une expérience d’apprentissage intense mais enrichissante. Et lorsqu’elle a décidé de ne pas reprendre ses fonctions, ma familiarité avec le poste m’a positionnée comme la candidate naturelle pour sa succession.

J’étais perçue comme une collaboratrice engagée, prête à faire le pas en plus : c’est ce qui m’a propulsée de junior à senior en peu de temps, et m’a rendue visible dans l’entreprise. Cette visibilité est essentielle pour progresser car, quand un job s’ouvre, il faut qu’on pense à vous avant que vous ne pensiez au job. C’est comme ça que cela fonctionne. Mais la visibilité, ce n’est pas de la parole, c’est du travail et de l’engagement. C’est d’abord être le meilleur dans son job.

D’ailleurs, chaque opportunité professionnelle me concernant s’est faite de cette manière. L’entreprise, même la plus grande, est un petit monde : quand on est reconnu pour ses qualités professionnelles, les portes ont tendance à s’ouvrir plus facilement.

Vous êtes passée, en quatre ans seulement, d’un poste junior à celui de vice-présidente Strategy Pricing & Interchange Europe. Comment cela s’est fait ?

Souvent, les gens parlent des opportunités qu’ils ont su saisir mais j’aime aussi souligner qu’il faut provoquer ces opportunités. Elles arrivent quand se mêlent efforts, résultats et audace. Donc oui, il faut délivrer. Il faut performer. Il faut s’engager.

En 2019, un ancien manager m’a ainsi rappelé pour me proposer une nouvelle mission avec un niveau de Directrice qui plus est. Mais le poste était basé à Bruxelles, à un moment où le télétravail n’était pas encore entré dans la culture professionnelle des grandes entreprises. De mon côté, j’étais en cours de naturalisation en France et je ne voulais pas quitter Paris. Nous avons donc négocié et trouvé un accord pour partager équitablement mon temps entre Paris et Bruxelles.

Je suis entrée en fonction fin 2019 et deux mois et demi plus tard, la pandémie renvoyait tout le monde travailler de chez soi et changeait durablement notre vision du travail à distance. Avant le COVID, je bousculais les pratiques ; après, j’étais la nouvelle norme. Quelque part, c’est aussi un peu cela l’audace que j’évoquais plus tôt.

Comment avez-vous vécu cette période de la pandémie dans un nouveau poste ?

Mes nouvelles fonctions de Vice-présidente Strategy Pricing & Interchange Europe n’étaient pas totalement étrangères à ce que je faisais auparavant. Avec un aspect encore plus stratégique, bien sûr. Je travaillais déjà pour ma région, l’Europe centrale en partenariat avec différentes parties prenantes dans toute l’Europe, afin de veiller à ce que notre modèle économique soit adapté au paysage industriel et à nos innovations technologiques. Et pour cela, je devais être dans l’analyse constante des échanges financiers, entre banques et commerçants par exemple, parce qu’en optimisant ces processus, on peut agir sur nos marges.

Pendant le confinement, je me suis donc totalement plongée dans ces nouveaux projets, avec deux dossiers-clé en particulier qui ont été une formidable opportunité d’engranger de l’expérience et de nouvelles compétences. J’ai toujours exercé mes fonctions dans cette logique de développement personnel et professionnel, d’acquisitions de nouveaux savoir-faire et savoir-être.

C’est aussi pour cela que j’ai mis à profit cette période sans déplacements afin de suivre un programme d’animateurs virtuels proposé par Mastercard. Car je me voyais évoluer vers plus de management. Je me suis toujours considérée comme chanceuse de l’accompagnement managérial dont j’avais bénéficié pendant ma carrière : j’avais donc envie d’être un modèle à mon tour.

Tout ceci m’a mené au poste que j’occupe depuis septembre 2023 de Vice-Présidente Strategy Pricing & Interchange. Dans ce rôle, je travaille avec une équipe formidable de directeurs régionaux. Je consolide également les données et projets pour l’ensemble de la région Europe et suis le point de contact entre le niveau régional et le niveau global.

Comment votre parcours international a-t-il façonné votre approche du leadership et de la stratégie ?

Je suis le produit d’un métissage très intime entre la culture dans laquelle j’ai grandi en Colombie, ma vie quotidienne en France aujourd’hui, ma carrière dans une entreprise américaine, aux équipes très diverses, et les influences indiennes venues de mon ex-belle-famille. C’est un cocktail fabuleux mais pas toujours simple.

Ce parcours m’a enseigné l’importance de l’empathie, de la communication et de la flexibilité, favorisant un leadership inclusif valorisant et tirant parti de la richesse de nos différences. Je crois qu’un management efficace doit aller au-delà de la langue que l’on parle ensemble, l’anglais dans mon quotidien professionnel, pour comprendre et intégrer les nuances culturelles qui affectent la communication, et donc la performance collective.

L’autre aspect essentiel de mon parcours international est cet esprit de proactivité qui m’anime en permanence et qui, selon moi, est au cœur de la progression en entreprise. Dès mon arrivée en France, à Audencia, et même avant pour intégrer l’école, j’ai dû me battre, trouver des solutions à des problèmes que je n’aurais pas eu en restant dans mon pays pour suivre une voie moins ambitieuse. Ensuite, une fois dans l’entreprise, j’ai continué dans cette voie, je me suis bâti un réseau professionnel solide grâce à des rencontres que j’ai su provoquer.

Finalement, je suis convaincue que le monde professionnel global dans lequel nous évoluons tous aujourd’hui, nous demande bien plus que de la stratégie et des compétences managériales : il exige une approche ouverte, adaptable et collaborative du travail. Et les parcours très tôt marqués par l’international me semblent être plus aptes à la développer.

Vous êtes passée, en quatre ans seulement, d’un poste junior à celui de vice-présidente Strategy Pricing & Interchange Europe. Comment cela s’est fait ?

Souvent, les gens parlent des opportunités qu’ils ont su saisir mais j’aime aussi souligner qu’il faut provoquer ces opportunités. Elles arrivent quand se mêlent efforts, résultats et audace. Donc oui, il faut délivrer. Il faut performer. Il faut s’engager.

En 2019, un ancien manager m’a ainsi rappelé pour me proposer une nouvelle mission avec un niveau de Directrice qui plus est. Mais le poste était basé à Bruxelles, à un moment où le télétravail n’était pas encore entré dans la culture professionnelle des grandes entreprises. De mon côté, j’étais en cours de naturalisation en France et je ne voulais pas quitter Paris. Nous avons donc négocié et trouvé un accord pour partager équitablement mon temps entre Paris et Bruxelles.

Je suis entrée en fonction fin 2019 et deux mois et demi plus tard, la pandémie renvoyait tout le monde travailler de chez soi et changeait durablement notre vision du travail à distance. Avant le COVID, je bousculais les pratiques ; après, j’étais la nouvelle norme. Quelque part, c’est aussi un peu cela l’audace que j’évoquais plus tôt.

Comment avez-vous vécu cette période de la pandémie dans un nouveau poste ?

Mes nouvelles fonctions de Vice-présidente Strategy Pricing & Interchange Europe n’étaient pas totalement étrangères à ce que je faisais auparavant. Avec un aspect encore plus stratégique, bien sûr. Je travaillais déjà pour ma région, l’Europe centrale en partenariat avec différentes parties prenantes dans toute l’Europe, afin de veiller à ce que notre modèle économique soit adapté au paysage industriel et à nos innovations technologiques. Et pour cela, je devais être dans l’analyse constante des échanges financiers, entre banques et commerçants par exemple, parce qu’en optimisant ces processus, on peut agir sur nos marges.

Pendant le confinement, je me suis donc totalement plongée dans ces nouveaux projets, avec deux dossiers-clé en particulier qui ont été une formidable opportunité d’engranger de l’expérience et de nouvelles compétences. J’ai toujours exercé mes fonctions dans cette logique de développement personnel et professionnel, d’acquisitions de nouveaux savoir-faire et savoir-être.

C’est aussi pour cela que j’ai mis à profit cette période sans déplacements afin de suivre un programme d’animateurs virtuels proposé par Mastercard. Car je me voyais évoluer vers plus de management. Je me suis toujours considérée comme chanceuse de l’accompagnement managérial dont j’avais bénéficié pendant ma carrière : j’avais donc envie d’être un modèle à mon tour.

Tout ceci m’a mené au poste que j’occupe depuis septembre 2023 de Vice-Présidente Strategy Pricing & Interchange. Dans ce rôle, je travaille avec une équipe formidable de directeurs régionaux. Je consolide également les données et projets pour l’ensemble de la région Europe et suis le point de contact entre le niveau régional et le niveau global.

Comment votre parcours international a-t-il façonné votre approche du leadership et de la stratégie ?

Je suis le produit d’un métissage très intime entre la culture dans laquelle j’ai grandi en Colombie, ma vie quotidienne en France aujourd’hui, ma carrière dans une entreprise américaine, aux équipes très diverses, et les influences indiennes venues de mon ex-belle-famille. C’est un cocktail fabuleux mais pas toujours simple.

Ce parcours m’a enseigné l’importance de l’empathie, de la communication et de la flexibilité, favorisant un leadership inclusif valorisant et tirant parti de la richesse de nos différences. Je crois qu’un management efficace doit aller au-delà de la langue que l’on parle ensemble, l’anglais dans mon quotidien professionnel, pour comprendre et intégrer les nuances culturelles qui affectent la communication, et donc la performance collective.

L’autre aspect essentiel de mon parcours international est cet esprit de proactivité qui m’anime en permanence et qui, selon moi, est au cœur de la progression en entreprise. Dès mon arrivée en France, à Audencia, et même avant pour intégrer l’école, j’ai dû me battre, trouver des solutions à des problèmes que je n’aurais pas eu en restant dans mon pays pour suivre une voie moins ambitieuse. Ensuite, une fois dans l’entreprise, j’ai continué dans cette voie, je me suis bâti un réseau professionnel solide grâce à des rencontres que j’ai su provoquer.

Finalement, je suis convaincue que le monde professionnel global dans lequel nous évoluons tous aujourd’hui, nous demande bien plus que de la stratégie et des compétences managériales : il exige une approche ouverte, adaptable et collaborative du travail. Et les parcours très tôt marqués par l’international me semblent être plus aptes à la développer.

Et pour vous, Ana Maria, que peut-on vous souhaiter pour l’avenir ?

De continuer à tracer mon propre chemin. Qu’importe ce qu’il me réserve, pourvu qu’il soit pleinement mien. Je veux aussi pouvoir le partager pour inspirer à mon tour, des femmes en particulier, en racontant les défis que j’ai pu relever. Je veux faire rayonner la force que j’ai tirée de ces choix, celui de ne pas avoir d’enfant en particulier, pour donner à chacune la motivation de suivre sa propre voie.

You May Also Like

Jon Harr

Elisabeth Gautier

Delphine Francois Chiavarini

Marie Comacle